Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
La Hussarde
La Hussarde
Newsletter
Derniers commentaires
8 avril 2013

Inhumanité

La blessure est ignoble. Le coeur est touché la vie est en danger. Le sang coule sans que ses mains appuyées contre la chair ouverte parviennent à l'arrêter. Son souffle s'épuise, elle a trébuché maintes fois dans les décombres sans pourtant s'arrêter mais maintenant elle s'arrête, vaincue par la douleur, vaincue par la nuit sans fond qui boit ses larmes et sa souffrance comme un buvard noir. Les déflagrations résonnent de partout, elle ne sursaute même plus, la peur est loin à présent ne reste plus que la mort, là juste à côté d'elle, tout près, si près qu'elle fait presque corps avec elle.

Le feu brûle cependant partout autour d'elle. Le feu qu'elle a allumé avant de tenter de s'enfuir de ce camp de la mort. Il n'y a plus rien autour d'elle que des morts et des restes d'objets chers consummés, des moceaux de cendres chaudes où ses pieds nus se brûlent. Elle voudrait s'enfuir loin, là où l'horizon l'appelle, là où il fait beau peut-être, là où seul règne le silence apaisant d'une nature vierge et où l'on entend encore le chant des oiseaux mais non elle n'arrive plus à bouger.

Le poignard est profondément enfoncé dans son coeur. De toutes ses forces affaiblies elle a tenté maintes fois de l'arracher. Maintenant, appuyée contre un mur de béton, elle essaie de reprendre son souffle, de respirer malgré tout. Elle regarde hagarde le vieux fantôme venu la chercher, elle savait pas qu'il pouvait prendre une telle forme, la tromper à ce point...La Camarde a plus d'un tour dans son sac. Cette fois, sa vieille ennemie est venue la chercher dans ce qu'elle avait de plus cher, de plus précieux, elle est venue la chercher jusque dans son lit - dans le corps et l'âme de celui qu'elle aimait. Et c'est ainsi qu'un matin, à l'aube d'une nuit blafarde dont elle se souviendra toute sa vie si cependant elle arrive à la sauver cette putain de vie, l'homme qu'elle aimait n'était plus lui, il était elle, la Camarde...

Le goût du sang monte à ses lèvres, un terrible haut-le-coeur la révulse toute entière. Il faut cependant vivre car je l'ai promis, je ne peux pas céder le terrain à ma plus vieille ennemie, pas avant que mon heure véritable ait sonné, pas maintenant ! Je suis jeune, je suis belle, j'ai une armée derrière moi, des hommes que j'aime et qui m'aiment, une enfant à protéger, une terre à reconstruire quelque part...Je ne veux pas mourir !

Les larmes inondent son beau visage laminé par la fatigue du combat. Elle regarde longuement le visage aimé, lui qui l'a trahie, lui en qui elle avait remis toute sa confiance, pour qui elle avait déposé les armes, lui à qui elle avait tout sacrifié jusqu'à sa force de guerrière - lui qui ose maintenant la traiter de faible et de fragile. Ses deux mains saisissent le manche du poignard enfoncé jusqu'à la garde dans son coeur. La Camarde ricane : tu ne pourras pas ma fille, tu es si faible maintenant, tu vas crever pour de bon, il a rêvé que tu te suicidais et tu vas le faire parce que je suis là et que je t'attends depuis si longtemps, je te veux tu entends !

Rien n'a bougé dans le paysage décimé. Et cependant la Hussarde a relevé la tête soudain : là-bas, très loin dans la nuit elle a entendu le bruit si cher à son coeur des sabots qui galopent. Il n'est pas loin. Il est venu l'emmener loin de cet enfer, là où le soleil existe encore, là où la campagne est riche d'herbages et de chants d'oiseaux, là où la mort n'est plus que renaissance au printemps, à chaque fois vaincue par une nature plus somptueuse. Il l'attend, son beau cheval noir tant aimé.

La Hussarde saisit à pleines mains le manche du poignard, toutes ses forces restantes rassemblées en un ultime effort, le visage de l'aimé s'est fondu avec celui de la Mort, elle ferme les yeux pour ne plus le voir...Et soudain, son cheval est là devant elle, piaffant d'impatience. Alors, dans un dernier effort, sans même plus y croire, elle tire le manche vers l'extérieur...la lame se dégage, dégoulinante de son sang, elle croit défaillir, mais les yeux plongés dans ceux de son cheval elle poursuit le travail, la lame vient toute entière, la Hussarde s'écroule sur le dos de l'équidé -elle a juste la dernière force de l'emjamber et de s'accrocher à sa crinière.

Le cheval noir s'envole dans un galop puissant, broyant les décombres sous ses sabots, faisant voler les éclats d'obus et la cendre mêlés.

La Camarde est restée sur le champ de bataille, baignée dans le sang et le feu, celui que j'aimais est mort, c'était lui ou moi, j'avais pas le choix. Maintenant je galope vers la vie, vers ma vie, elle m'attend.

 

Publicité
Commentaires
S
V. ah ta fille, elle avait trois ou quatre ans quand dans ton premier blog tu en parlais quelque fois Tu avais créé un chapitre rien que pour elle Maintenant elle peut en avoir dix Je souhaite qu'elle soit restée comme à l'époque : libre révoltée impudente C'est la plus belle chose qui puisse lui être arrivée<br /> <br /> Serge
V
Comme je suis heureuse de vous retrouver chez moi, chère Ange ;) Avec quel plaisir je parcourrais les espaces en votre charmante compagnie, montez en selle et venez avec moi...
A
Quel feu, quelle fougue !!!<br /> <br /> Vous revoici, énergique et combattive.<br /> <br /> Votre énergie est à ce point communicative que nous sautons tous en selle sans hésiter pour galoper derrière vous.<br /> <br /> Baisers.
V
@Photaphil : il reste plus qu'à lever les couleurs ;) <br /> <br /> Moi aussi, heureuse de vous retrouver ;)
V
@Pascou : il est vrai que je me fais un point fort de toujours rester en selle ;) Merci de ton passage, il me fait très plaisir.
La Hussarde
Publicité
Archives
Visiteurs
Depuis la création 12 422
Publicité